Il y avait de la dérouillée dans l’air. Mais, contre toute attente, elle s’est abattue dimanche soir sur Les Républicains, bien davantage que sur La République en Marche. Certes, Emmanuel Macron perd son pari face à Marine Le Pen : son mouvement (LREM) ne récolte que 22,41% des voix aux Européennes, contre 23,31% au RN. L’échec était prévisible. Reste que l’écart des voix (moins de 1%) limite la déroute envisagée. « Ce n’est pas une défaite », a même cru même pourvoir assurer, ce matin sur Europe 1, Nathalie Loiseau, la tête de liste LREM. Il est vrai que la macronie peut se réjouir d’avoir poursuivi avec succès le dynamitage des vieux partis. Le parti socialiste, associé à Place Publique, ne récolte que 6,3% des suffrages. Quant à la liste PR, conduite par le prometteur François-Xavier Bellamy, elle s’effondre à 8,44%. Là est le séisme. J’avoue ne l’avoir pas envisagé. Les sondeurs non plus n’ont rien vu venir. La Bérézina oblige la droite de Laurent Wauquiez à admettre qu’elle n’est plus crédible aux yeux des Français, même si près de 50% des électeurs n’ont pas participé au scrutin. Le bureau politique des LR doit se réunir ce lundi soir. Il n’est pas sûr que les caciques du parti soient disposés à entendre ce que suggèrent les électeurs en invitant la vieille droite à choisir son nouveau camp, bien dessiné par Macron : soit celui des « progressistes », dominés par LREM, soit celui des souverainistes, dominés par le RN. Le spectre de « l’extrême droite » est devenu un cliché qui ne rend plus compte de la diversité du vote civilisationnel. Dès hier soir, la gauche en déroute n’avait que le mot « union » à la bouche. Mais ce que s’autorisent les socialistes depuis 1971 et le congrès d’Epinay, qui allait sceller l’alliance avec le très stalinien PCF, est refusé à la droite par les faiseurs de morale. Cet interdit unilatéral a été tellement intégré par la droite de gouvernement qu’elle est la première désormais a rejeter l’hypothèse d’un rapprochement avec le RN, alors que celui-ci n’a plus rien de commun avec l’infréquentable FN de Jean-Marie Le Pen. Dès hier soir, les barons de LR semblaient être d’accord pour relancer, sans autre imagination, l’union avec le Centre, en passant par le silencieux Xavier Bertrand. « Tout est à reconstruire du sol au plafond », a expliqué Valérie Pécresse, ce matin sur RTL. Reste que la fin de l’histoire est déjà écrite, si Les Républicains persistent à regarder de haut un RN qui capte le vote souverainiste : lors de la prochaine présidentielle, en cas de probable nouveau duel Macron-Le Pen, cette dernière aura de grande chance d’être à nouveau battue, à cause de son isolement. C’est cette absurdité qui est à résoudre, alors que partout en Europe les populistes se consolident sur des alliances et des personnalités compétentes. Sur les questions sociétales, les différences entre François-Xavier Bellamy et Jordan Bardella étaient mineures. Des électeurs LR ont d’ailleurs apporté des voix à la liste RN, dans la recherche d’un vote utile. Macron, comme la gauche, redoute une union des droites. Or son opposition aux souverainistes est l’occasion de consolider cette force politique, seule capable d’assurer l’alternance.

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