Les médias, qui s’autorisent le recours aux micros cachés ou aux caméras dissimulées afin de voler des propos ou des images, ne sont pas les mieux placés pour s’indigner de « l’affaire Buisson » dont certains paradoxalement se délectent. Le Canard Enchaîné et le site Atlantico publient, ce mercredi, des extraits de conversations politiques enregistrées par l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, à l’insu de ses interlocuteurs semble-t-il. Buisson aurait pris pour habitude, lors de ses entrevues à l’Elysée ou ailleurs, de glisser un dictaphone dans sa poche et de le laisser tourner, parfois jusqu’à son retour chez lui. Ceux qui, à droite comme à gauche, avaient des comptes à régler avec le théoricien de la droitisation de l’UMP ont désormais sous la main un coupable idéal. Ils ne se privent pas de dénoncer « une affaire d’Etat », une « confiance trahie », une « atteinte aux institutions », des « pratiques d’extrême droite », « une affaire extrêmement grave », etc. Le PS envisage de demander une commission d’enquête parlementaire, au cas où Sarkozy ne porterait pas plainte, ce qu’il ne semble pas décidé à faire. « Ce n’est pas une péripétie politicienne. C’est une atteinte au fonctionnement de l’Etat et de la démocratie. Le chef de l’Etat a été mis sous surveillance », estime Bruno Le Roux au nom des socialistes. Buisson a-t-il mis l’Etat sous surveillance ? François Hollande l’a été, mais par l’administration de Barack Obama, avec les écoutes de l’Agence nationale de sécurité (NSA) que le président américain s’est engagé à faire cesser en janvier. L’Etat lui-même a procédé à plusieurs reprises à des écoutes illégales, les plus célèbres étant celles avalisées par François Mitterrand quand il était à l’Elysée. A en croire l’avocat de l’ancien conseiller, Me Gilles-William Goldnadel, son client enregistrait pour éviter d’avoir à prendre des notes et dans le seul cadre de son travail de conseiller ; voire de mémorialiste. De fait, Alain Peyrefitte ou Jacques Attali ont eux-mêmes publié des verbatims présidentiels, mais en retranscrivant de mémoire, suppose-t-on, leurs conversations du jour. Rien ne permet néanmoins de mettre en doute cette défense de Buisson, d’autant qu’il apparait souvent, dans le décryptage des enregistrements, dans le mauvais rôle du dézingueur. La question est donc de savoir qui a fait main basse sur ces enregistrements qui étaient conservés, semble-t-il, au domicile de l’intéressé. S’ils proviennent de perquisitions annexes, ils n’avaient pas à être retenus par la Justice. L’autre question est donc de savoir par quel cheminement ces bandes ont atterri dans des rédactions, à la grande satisfaction du PS. La dissimulation de Buisson est une faute. Mais beaucoup de ses procureurs sont suspects.Je participerai, jeudi, à On refait le monde, sur RTL (19h15-20h).
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