Les mêmes causes produisant les mêmes effets, d’autres drames urbains sont à prévoir après celui qui a frappé la Côte d’Azur samedi soir : 17 personnes au moins ont perdu la vie, noyées par les crues subites dues à des trombes d’eau très localisées, mais surtout à un bétonnage impensé des paysages longeant les rivières. Dans les reportages télévisés, les mêmes images se succèdent régulièrement, montrant des garages dévastés, des salons méconnaissables, des voitures retournées, des campings disparus, des hommes et des femmes au bord des larmes repoussant à la pelle ou au balai la boue de leur maison, aidés de voisins compatissants et de pompiers rassurants. Le réchauffement climatique est généralement avancé dans les commentaires qui tirent à la ligne, tandis que les hommes politiques se précipitent sur place, chef de l’Etat en tête, dès les premières victimes annoncées. En l’occurrence, les orages qui ont noyé les Alpes-Maritimes samedi soir n’avaient en réalité rien d’exceptionnels pour la région, hormis leur intensité. Les vraies raisons sont à rechercher, une fois de plus, dans une politique d’urbanisation frénétique, pour qui la moindre parcelle de terre devient l’emplacement de logements, de parkings, de supermarchés. Le court-termisme cupide et l’absence de réflexion des décideurs sont à l’origine de ces tragédies humaines. Or ce même enfermement intellectuel se retrouve dans d’autres dossiers voguant vers le même naufrage annoncé. Ainsi apprend-on, ce lundi, que la direction d’Air France prévoit la suppression de 2 900 postes et la réduction de nombreuses dessertes internationales, après le refus corporatiste et buté des pilotes de s’aligner sur leurs collègues européens, qui travaillent plus pour un salaire moindre. Quant aux soixante-dix ans de la Sécurité sociale, ils sont l’occasion d’en défendre la pérennité sans s’interroger sur son gouffre. Créée le 4 octobre 1945 par une ordonnance du Général de Gaulle, la Sécu est présentée comme l’héritage intouchable du Conseil de la Résistance et l’aboutissement indépassable de la protection universelle. Or ces deux préalables sont inexacts. Tout d’abord, la Sécurité sociale est d’avantage une invention de Vichy qu’un legs de la Résistance. C’est dès 1940 qu’un rapport préconise d’imposer à tous les salariés une affiliation au système d’assurances sociales, unique pour tous. Comme le rappelle Eric Verhaeghe (L’Opinion, 30 septembre) : « Les hommes sur qui Pétain s’appuie pour réformer se retrouveront aux manettes à la Libération et c’est eux qui achèveront en 1945 l’édifice commencé en 1940 (…) Alexandre Parodi et Pierre Laroque devront attendre la fin de la guerre pour réaliser l’œuvre que Vichy n’a pas voulu achever ». Surtout, la Sécurité Sociale, belle mais coûteuse invention, repose aujourd’hui sur un Himalaya de dettes (480 milliards d’euros, et même 720 milliards d’euros en y incluant l’assurance chômage) laissées scandaleusement à la charge des jeunes générations qui n’ont aucune garantie d’être durablement assurées à leur tour. La Sécu a été conçue pour une société homogène et solidaire, comme l’était la France en 1945. Son endettement colossal, ajouté à une fragilisation des liens sociaux, devraient inciter les dirigeants à réfléchir désormais à d’autres formules plus souples, faisant appel à la capitalisation et à la concurrence. Or, ici comme en matière d’urbanisme ou de puissance syndicale, le poids des habitudes et des inerties politiques est tel que rien n’est fait pour prévenir la catastrophe prévisible. La jeunesse appréciera le cadeau. Je participerai, ce lundi, à On refait le monde, sur RTL (19h15-20h)
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