Une nation appauvrie ; un État faible : ce constat ressort, cette semaine, d’une série de faits alimentant le récurrent pessimisme des sondés face à l’avenir. Lundi soir, sur TF1, onze Français, la plupart confrontés aux difficultés des fins de mois, ont pu interpeller le chef de l’État au nom de l’opinion publique. Plus tôt, la République venait d’être mise en échec par 124 clandestins, Kurdes de Syrie, débarqués par des négriers sur une plage corse avant d’être libérés par des juges pour être soignés, nourris, logés aux frais de la collectivité. « Je ne laisserai pas la France désarmée », a promis Nicolas Sarkozy. Désarmé : le mot juste.
Le sentiment d’abandon, souvent rappelé ici à fin de mise en garde, est devenu palpable. La critique présidentielle contre les banquiers, mercredi à Davos, n’éteindra pas si vite les ressentiments. Ils se liront, aux régionales, dans les abstentions et les votes protestataires. Comment croire, en effet, les citoyens rassurés par les déficits de leur système de santé ou d’aide sociale, qui continue d’attirer la misère du monde avec les encouragements des belles âmes ? Comment les imaginer faire soudainement confiance à un monde politique impuissant à résoudre la paupérisation de la classe moyenne et la perte d’autorité des lois ?
Entendre Michel Rocard, lundi, accuser Éric Besson de suivre une politique d’immigration « qui n’est pas à l’honneur de la France » en tressant des lauriers aux magistrats qui relâchent ceux qui ont jeté leurs papiers à la mer donne une idée du persistant angélisme des élites. Alain Juppé est sur le même nuage quand il estime que le débat sur l’identité ne vise qu’à exprimer « l’islamophobie ». Ces personnalités sont des aubaines pour les passeurs qui rançonnent ou pour les islamistes qui prônent la burqa. Ceux-là savent utiliser les failles des lois et des droits de l’homme.
C’est à ce coup de main que se sont prêtés des juges des libertés et de la détention. Ils ont libéré les Kurdes, qui ne seraient pas maltraités en Syrie et qui ont pu débourser 10 000 dollars chacun pour leur périple, en arguant qu’ils n’avaient pas été placés d’abord en garde à vue. Mais des magistrats instructeurs relâchent aussi des coupables présumés, pour contester cette même procédure. À quoi rime donc ce jeu sinon à déstabiliser l’État ? C’est la législation qu’il faut adapter. En renonçant, hélas, aux bons sentiments.
Faiblesse de la République La République tenait, avec la burqa, l’occasion de démentir sa faiblesse, en se disant, d’une même voix, opposée à cet étendard obscurantiste qui la nargue. C’est l’effet inverse qui est résulté, mardi, des conclusions cacophoniques de la mission parlementaire sur le sujet. Sous le prétexte de ne pas stigmatiser les musulmans (mais personne ne se préoccupe de la persécution des chrétiens en terres musulmanes), la gauche ne se résout pas à interdire ce signe revendicatif d’une idéologie sexiste et totalitaire. Les « consciences » prétendument voltairiennes capitulent devant les provocations islamistes. Mardi, l’imam de Drancy, Hassen Chalghoumi, a été leur cible pour avoir soutenu l’interdiction du voile intégral et être proche de la communauté juive. Or les people préfèrent pétitionner dans Libération pour les sans-papiers, tandis que le comique Jamel Debbouze dénonce le « racisme » des antiburqa (voir mon blog).
« Ce qui est gravissime, c’est la complaisance d’une partie de la gauche », estime le président de la mission parlementaire, le communiste André Gerin, lâché par son parti, anticlérical, dans sa description d’une talibanisation de certains quartiers. La capitulation gagne ceux qui, au nom de l’apaisement, refusent de résister à l’islam politique qui en appelle à la tolérance démocratique quand cela l’arrange et la refuse au nom de ses propres règles. Les chrétiens ne se disent pas humiliés par la République quand celle-ci dresse ses listes noires de sectes issues de leur religion ; pourquoi faudrait-il que les musulmans se sentent victimes d’une « haine » quand de semblables dérives, autrement plus dangereuses que la Scientologie, mobilisent le législateur ? C’est pourtant ce que soutiennent les néofondamenlistes et les bons apôtres, leurs idiots utiles. La droite assurera-t-elle le rebond espéré ?
Peur du mot Le PS, par la voix de Jean-Marc Ayrault, a atteint des sommets dans l’hypocrisie et la lâcheté en conditionnant, mardi, son approbation de la résolution contre la burqa à l’abandon préalable du débat sur l’identité nationale. Courage, fuyons les sujets difficiles ! Pour sa part, à peine Martine Aubry avait-elle, sur le dossier des retraites cette fois, donné dimanche le sentiment de s’extraire du dogme du départ à 60 ans pour aller « vers 61 ans ou 62 ans » qu’elle s’empressait de revenir s’incliner devant le vieux totem. À dire vrai, la droite n’est guère plus audacieuse que la gauche en la matière. Alors que le système par répartition est à bout de souffle (en 2050, il ne restera qu’un cotisant pour un retraité) c’est ce mécanisme qu’a défendu le président, lundi. Le jour même, L’Humanité reconnaissait que « la peur d’une défaillance du système des retraites pousse 53 % des jeunes de moins de trente ans à s’orienter vers la capitalisation ». Mais, même de ce dernier mot, la République a peur…
« Redresser la France » La relaxe, hier, de Dominique de Villepin dans Clearstream, ce faux « Watergate » politico-médiatique : il y voit l’opportunité politique de « contribuer à redresser la France ». Mais l’opinion en a soupé des discours. Elle attend des actes.

Partager cet article
S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
le plus récent
le plus ancien
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires
0
Laisser un commentairex