D’abord, le meilleur : cette année de crises a relancé l’Europe. 2008 retiendra, des six mois de présidence de Nicolas Sarkozy, que l’Union a su dépasser son image de monstre technocratique et bien pensant pour apparaître, enfin, en défenseur des peuples et des nations. La capitale géorgienne serait tombée aux mains des Russes, cet été, si les 27 n’avaient pas fait front dans l’instant. Quant au plan de relance censé amortir le séisme financier, il avalise un protectionnisme qui relativise la prétendue « mondialisation heureuse ».
Pour 2009, une conjonction de malaises sociaux et éducatifs se profile, dont la jeunesse pourrait être le porte-voix. À dire vrai, elle a des raisons de s’estimer bernée par une société qui s’endette sur son dos, la flatte pour mieux la tromper et l’abrutit de son matérialisme. Quand le chercheur Patrick Weill défend (dans Le Monde du 17 décembre) la suppression, pour les concours, des épreuves de culture générale et de langues vivantes parce qu’elles seraient « discriminantes », cette acceptation d’une déculturation, déjà décrite (Bloc-notes du 5 décembre), revient à encourager une régression.
Ce renoncement à un savoir « élitiste et bourgeois » fait injure aux moins favorisés. Les textes scolaires de l’Allemagne nazie ou de l’Italie fasciste offraient un lexique et une syntaxe élémentaires, car un langage réduit empêche la réflexion au profit d’un prêt-à-penser. « Arrêtons de jouer avec l’éducation », disait l’autre jour le panneau d’un manifestant. Ceux-là, quand ils demandent davantage de professeurs et d’heures de cours, méritent souvent d’être entendus. Derrière les slogans ânonnés, il y a aussi des appels au secours.
L’acceptation d’une décadence, qui apparaît dans les propositions de réduction des sélections au seul savoir-faire, porte les pires scénarios. L’exemple de la Grèce, berceau de notre civilisation, serait-il la répétition d’affrontements redoutés ailleurs ? « Les ados qui manifestent dans les rues d’Athènes sont les produits d’une éducation déficitaire », fait remarquer l’écrivain Takis Théodoropoulos (dans Libération du 19 décembre). Ils ont mis le feu à la bibliothèque de l’école de droit, à la Bibliothèque nationale et au Musée archéologique d’Athènes. Ainsi font les totalitarismes.
Le danger est dans la récupération de ces jeunes. En Grèce, l’extrême gauche et ses encagoulés nihilistes ont mené les assauts et incité à brûler les livres. Les émeutiers des cités françaises avaient aussi été poussés à mettre à sac des bibliothèques et des écoles en 2005. Une semblable insurrection, généralisée à l’ensemble de la jeunesse, est un rêve caressé par les radicaux. Les lycéens leur laisseront-ils ce plaisir ? Urgent de les prévenir de l’instrumentalisation.
Mai en janvier ? La gauche espère voir mai en janvier. Après avoir prédit un printemps brûlant à l’occasion du quarantième anniversaire des événements de 1968, elle croit à nouveau son heure venue grâce à la crise financière et économique, qui réserve d’autres brutalités. Gérard Aschieri (FSU) dit s’attendre « à une suite de mouvements dans l’éducation nationale » et à un mouvement social « remarquable » en janvier. Un appel à la grève est lancé pour le 29 janvier. Le parti d’Olivier Besancenot s’est rodé dans les dernières manifestations lycéennes particulièrement violentes. Une vingtaine de proviseurs ont été blessés. C’est sur ces braises que le PS veut souffler en espérant renouer avec le peuple. Les Français auraient-ils changé au point de se laisser manœuvrer par des boutefeux prêts à contourner la démocratie par la rue ? Rien n’est moins sûr.
Laisser croire, comme le fait la pensée moutonnière, que seul le pouvoir d’achat serait au centre des préoccupations des gens revient à s’aveugler sur le reste. Or la tension dépasse de simples préoccupations terre à terre, auxquelles le gouvernement devra bien sûr répondre. L’inquiétude collective tient à l’avenir de la nation elle-même. Comme le note Jean-Pierre Chevènement (Sénat, 1er décembre), « l’effacement de la France » est devenu un risque, notamment si devaient triompher « les communautarismes et la perte du lien civique ; antichambre de la guerre civile ». Les profanations de lieux de culte sont en cela de mauvais présages. Voilà le vrai défi à relever pour 2009.
Sursaut S’il doit y avoir un sursaut, il doit apparaître notamment à travers une hiérarchie des réformes et une lucidité face aux menaces intérieures. L’école ne peut plus être cette priorité floue alors qu’elle est au centre de la cohésion sociale affaiblie. Les professeurs Daniel Lefeuvre et Michel Renard doivent être entendus quand ils écrivent : « Il faut admettre que l’islamisme est bien une idéologie de rupture avec la culture occidentale, avec l’identité nationale française  » ( in Faut-il avoir honte de l’identité nationale ? Larousse). L’extrémisme de gauche partage d’ailleurs avec l' » islam révolutionnaire » de semblables ennemis qui les rapprochent. Quant à l’effet Obama, qui aura monopolisé une partie de 2008, il ne peut être compris, comme il l’a été en France, comme une incitation à promouvoir des minorités parce qu’elles seraient noires ou arabes. Puisse 2009 donner davantage la parole à ceux et celles qui, comme Malek Boutih, Fadela Amara, Sihem Habchi, Bouchera Azzouz, Malika Benlarbi, etc., défendent la seule méritocratie républicaine et la fierté d’être français.

Partager cet article
S’abonner
Notifier de

0 Commentaires
le plus récent
le plus ancien
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires
0
Laisser un commentairex