Forcément, les résistants d’opérette ignorent le
ridicule. Les mêmes qui dénoncent le
retour du fascisme chez ceux qui s’alarment de la crise identitaire (diagnostic pourtant repris par Manuel Valls) hurlent cette fois au nazisme pour
dénoncer ceux qui donnent raison à Angela Merkel contre Alexis Tsipras, le
premier ministre grec. L’hystérie anti-allemande, qui a poussé Nicolas
Dupont-Aignant à parler de « IV e Reich », jette une partie de l’opinion
dans les bras des faussaires et des maîtres-chanteurs. Ce qui est reproché à la Chancelière, présentée
comme un Hitler en jupon par les plus extrémistes, est d’appeler au respect du
contrat signé, de la parole donnée, de la solidarité équilibrée. Or le plus
navrant dans cet affrontement, qui s’est conclu ce lundi matin par un accord de
la zone euro à y maintenir la Grèce, est d’avoir observé la France se mettre du
côté des cancres, des bidouilleurs de bilans, des joueurs de bonneteau. Tsipras, en instrumentalisant le référendum, a décrédibilisé un peu plus la
parole de son pays. Il a déshonoré une légitime démarche « populiste » pour en faire un instrument de
chantage. Si Merkel a eu un mérite, durant ce week-end agité, c’est d’avoir
redonné un minimum d’autorité et de tenue à l’Europe paillasson (voir mon dernier
bloc-notes). Cette ébauche de fierté européenne, qui vaut bien la respectable fierté grecque chantée par la gauche anti-libérale et néocommuniste
(néocom), saura-t-elle redonner un souffle à cette Tour de Babel qu’est l’Union européenne, qui n’a ni
langue ni culture communes ? Les fissures font apparaître la
fragilité d’un édifice trop peu homogène et mal construit.
Ce qui ne se dit pas, c’est que la Grèce orthodoxe et déjà
orientale a peu à voir avec l’Occident romain et légaliste. Comme le remarque
Philippe d’Iribane dans Le Figaro de ce week-end : « En accueillant la
Grèce, l’Europe a cru recevoir Platon. Elle a plutôt fait place à Ulysse,
stratège génial, expert en ruses et déguisements, généreux en promesses ».
Un lecteur, Mr A.V., m’a fait parvenir, vendredi, quelques observations écrites
par Polybe au II e siècle avant JC. Celle-ci par exemple : « Chez les
Grecs (…) les hommes qui manient les fonds publics, même si on ne leur confie qu’un
talent, même s’il y a dix contrôleurs qui apposent dix cachets différents et
deux fois autant de témoins pour les surveiller, ne peuvent rester intègres.
Chez les Romains, au contraire, magistrats et commissaires, quelle que soit
l’importance des fonds dont ils disposent, observent les règles de la probité
pour la seule raison qu’ils ont engagé leur foi par serment > (Polybe, Histoire, Quarto Gallimard,
page 602). Cette autre réflexion : < Certains stratèges allaient
jusqu’à puiser dans le trésor public pour faire des distributions d’argent aux indigents.
Les gens du peuple apprirent ainsi à soutenir et à élever aux magistratures des
hommes grâce auxquels leurs délits
resteraient impunis et leurs dettes impayées, et qui leur feraient verser
régulièrement des gratifications prélevées sur les fonds publics par des
autorités complaisantes. Opheltas, en particulier, ne cessait de concevoir (…)
de nouvelles mesures qui, si elles paraissaient, sur le moment, propres à
soulager les gens du peuple, devaient indiscutablement causer par la suite la
ruine de tous" (page 1006). L’histoire se répète. Mais que vient faire François Hollande dans cette galère grecque, sinon y cautionner des pratiques démagogiques?
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