Résumons: il est dangereux de fumer, de boire, de manger, d’aimer, de conduire, etc. Mais aussi: d’employer certains mots défendus, de franchir des lignes jaunes (ou rouges…), de virer populiste, etc. Le mieux, à suivre les alertes sanitaires qui s’abattent régulièrement sur les gens, serait de se convertir à l’hygiénisme en tout, y compris dans les idées préalablement homologuées par les faiseurs d’opinions comestibles. Je n’accuse aucune main invisible, qui chercherait sciemment à entretenir une terreur quotidienne pour adoucir les masses. Reste que la conjonction des interdits qui s’accumulent tous azimuts, répercutés par des médias conciliants face à ces alertes, amène à l’infantilisation des réactions que ces craintes suscitent. Lundi, l’OMS (organisation mondiale de la santé) a semé la panique générale en assurant que la viande rouge était « probablement cancérogène » et en jetant aussi sa suspicion sur les charcuteries, qui seraient responsables de la mort de 50.000 personnes dans un monde riche de sept milliards d’âmes. Mardi, Manuel Valls a assuré que Marine Le Pen était « aux portes du pouvoir » et qu’il fallait donc tout faire pour l’en écarter, quitte à s’allier, si nécessaire, avec Les Républicains aux second tour des régionales. Or cette manière d’imposer, partout, des comportements répondant à des principes de précaution révèle la peur qui habite ceux qui la distillent. Ce monde anémié et pantouflard qu’ils défendent en criant casse-cou est humainement invivable et politiquement abrutissant. Mardi, le chef de l’Etat et une partie du gouvernement se sont retrouvés à Petit Palais, en Gironde, pour une « cérémonie mémorielle » après le dramatique accident de car de Puisseguin (43 morts). Au voyeurisme des médias, qui n’avaient rien épargné ces derniers jours de la douleur et des larmes en gros plans des familles et des habitants, a succédé le grand spectacle du sentimentalisme compassionnel de l’Etat au grand complet. Pour ma part, je vois dans cette mascarade une régression de la politique, qui ne sait comment se rapprocher des citoyens sinon en partageant des peines devant des caméras. Les Français ont suffisamment de vraies raisons (économiques, sociales, culturelles) d’être inquiets pour ne pas leur en rajouter d’inutiles.
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