L’annonce par Benoît XVI, ce lundi matin, de sa propre démission à compter du 28 février, à 20 heures, laisse sans voix. Le dernier pape à avoir démissionné fut Grégoire XII en 1415 (1). Des raisons liées à la santé du Saint Père, 85 ans, expliquent ce coup de tonnerre, qui ébranle une Eglise catholique à la recherche d’un second souffle, en tout cas dans une Europe gagnée par le matérialisme. Il est évidemment tout à l’honneur du Pape épuisé, intellectuel et théologien brillant, d’avoir choisi de se retirer plutôt que d’offrir une image diminuée de lui-même. « Après avoir examiné ma conscience devant Dieu, à diverses reprises, je suis parvenu à la certitude que mes forces, en raison de l’avancement de mon âge, ne sont plus aptes à exercer de façon adéquate le ministère pétrinien », a-t-il indiqué en latin  lors d’un consistoire au Vatican. Si Benoît XVI n’a jamais eu le charisme de Jean-Paul II, sa douce modestie et sa vive intelligence l’ont rendu aussi populaire, notamment auprès des jeunes. On peut imaginer que la lucidité pénétrante qui caractérise ce philosophe l’a poussé à appliquer à lui-même, vieil homme fragile et fatigué, un abandon volontaire de la dévorante scène planétaire, au profit d’une retraite solitaire et méditative. A partir du 28 février commencera la période dite « sede vacante  (siège vacant) », avant l’organisation de l’élection de son successeur, à Pâques, symbole de la Résurrection…L’un des grands mérites de Benoît XVI a été de s’inscrire, à la suite de Jean-Paul II, dans le combat millénaire de l’Eglise pour la liberté des hommes, contre les totalitarismes et pouvoirs abusifs. Le pape, qui encourageait ses évêques à cesser d’être inutilement tièdes voire défaitistes, n’a eu de cesse de rappeler les valeurs de la raison et de l’esprit critique, en incitant à prendre des distances avec les modes, le relativisme contemporain, les discours imposés : des comportements souvent suivis ici, en dehors de toute bondieuserie. J’ai personnellement admiré ses leçons de résistance, appliquées au mépris des caricatures et des insultes ; elles ont été sources d’inspiration, par exemple dans la manière d’aborder dernièrement la critique du mariage homosexuel, au nom de la mémoire humaine et des droits de l’enfant. En fait, Benoît XVI a su être un formidable passeur de la Bible, lu comme un livre de philosophie politique. Comme l’écrit  Armand Laferrère, dans un ouvrage qui vient de sortir (2) et que je recommande : « La Bible reste l’une des pierres fondatrices de la liberté humaine. Si elle venait à ne plus être lue, comme toutes les tyrannies l’ont toujours souhaité, la liberté deviendrait plus difficile à défendre ». C’est cette culture judéo-chrétienne, qui met en valeur la liberté des hommes, qu’a su symboliser Benoît XVI. Cette liberté est plus que jamais d’actualité.(1) Rajouté mardi matin: en réalité, Célestin V a, le premier, abandonné le trône papal l’année même de son élection, en 1294(2) La liberté des hommes, lecture politique de la Bible, éditions Odile JacobJe participerai, mardi, à On refait le monde sur RTL (19H15-20h)

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