Les intrusions de l’islam dans la laïcité, ce non-dit, se heurtent à l’irritation de l’opinion. Les protestations apparues après l’annulation du mariage d’un couple de musulmans au prétexte que l’épouse avait menti sur sa virginité, assimilée par le tribunal de Lille à une « qualité essentielle de la personne », ont dévoilé une vigilance collective, plus aiguë chez les citoyens que leurs représentants. C’est l’indignation générale qui a poussé Rachida Dati à demander au parquet, lundi, d’interjeter appel.
En admettant que la chasteté de la mariée était déterminante aux yeux de son mari, la justice a bel et bien légitimé une pratique machiste, issue en l’occurrence d’une lecture du Coran infantilisant la femme. C’est d’ailleurs ce que dénonce le mouvement Ni putes ni soumises, qui manifestera demain. « Légitimer la répudiation, l’excision, les crimes dits d’honneur, les mariages forcés: voilà les dangers à long terme », analyse sa présidente, Sihem Habchi.
Ces Françaises, qui défendent leur émancipation sans renier leur religion, rappellent que leur volonté d’endiguer l’islam ne peut être comprise comme une agression contre les musulmans: ce que soutient pourtant l’idéologie antiraciste, qui voit de l’islamophobie dans les refus de comportements incompatibles avec la neutralité, l’égalité homme-femme, la liberté d’expression. Cette fois, cependant, des droits-de-l’hommistes eux-mêmes ont passé outre ces critiques interdites.
Le réveil général est un événement. Il montre une démocratie apparemment prête à défendre ses valeurs contre des choix régressifs. Mais le hourvari n’aurait probablement pas été tel si d’autres empiétements n’existaient déjà, de l’école à l’entreprise, dans une indifférence forcée. La cohabitation avec l’islam, sujet tabou qui suscite d’innombrables commentaires sur mon blog (1), préoccupe de nombreux Français. C’est ce qui ressort aujourd’hui.
Le pouvoir perçoit-il ce rejet tacite du communautarisme? Ce serait renforcer ce processus en cours que d’inscrire la diversité dans la Constitution, comme le souhaite Nicolas Sarkozy. « L’islam doit s’adapter ou partir », écrit l’écrivain Abdelwahab Meddeb (Le Débat, mai-août 2008), qui croit en un islam européen. Ce dernier, en effet, à toute sa place en France, s’il respecte les règles constitutives de la République. Ne pas craindre, pour cela, de rappeler d’élémentaires exigences.
Renoncements et intimidations Ce jugement, qui avalise un droit coutumier, est d’autant plus choquant que la justice algérienne ne cesse de poursuivre des chrétiens. Mardi, quatre Algériens convertis au christianisme ont été condamnés à de la prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Tiaret, pour « pratique illégale d’un culte non musulman ». Ce même tribunal a jugé dernièrement une jeune convertie au christianisme, poursuivie parce qu’elle possédait des bibles sur elle. En janvier, c’est un prêtre français qui a été condamné à un an de prison avec sursis pour avoir prononcé une prière hors d’un lieu de culte officiel. Un pasteur américain, présent dans le pays depuis plus de quarante ans, vient également d’être expulsé.
Or, qui entend les autorités protester? Sommée de s’ouvrir au multiculturalisme, notamment sous la pression de ceux qui réclament également sa repentance pour son passé colonial, la France se montre incapable d’exiger la réciprocité. Le père Christian Delorme va jusqu’à justifier (Le Monde, mercredi) « l’islamité » recherchée par l’Algérie, en montrant du doigt « le christianisme évangélique » de la « puissance impériale américaine ». Prêtre du diocèse de Lyon, il voit un danger dans « le prosélytisme chrétien en terre d’islam ». Le paradoxe prêterait à sourire, s’il ne reflétait un assujettissement partagé.
Le déni officiel face aux avancées islamistes en France encourage le prosélytisme, qui multiplie les voiles dans les cités. Des entreprises doivent aménager des heures de prière, quand la mixité n’y est pas aussi contestée. L’anthropologue Dounia Bouzar a vu (Le Figaro, 3 avril) « des salariés refuser le même frigidaire pour cause de viande impure ». Quand le lycée Lavoisier de Roubaix applique la « laïcité plurielle », c’est pour y généraliser la nourriture halal à la cantine. Si un historien, Sylvain Gouguenheim, prétend que l’Europe chrétienne a maintenu, sans l’aide des musulmans, ses liens avec la Grèce, il est conspué par ses collègues. Longue est la liste de ces renoncements et intimidations.
L’audiovisuel aussi Même l’audiovisuel public est confronté à ces subversions, que trop d’observateurs refusent de voir. Pour protester contre « la dérive éditoriale sans précédent de Monte Carlo Doualiya » (ex-RMC Moyen-Orient, filiale à 100% de Radio France internationale), les syndicats FO et CGC appellent à la grève, mercredi. « Le ton général de la radio est marqué par la propagande islamiste », explique Jean-Pierre Constantin, délégué syndical CGC. Il assure, ainsi, qu’il n’est pas rare de présenter comme « analystes politiques » des fonctionnaires du gouvernement iranien ou syrien ainsi que des militants islamistes. Acceptable?
Contestable impunité Brigitte Bardot, condamnée mardi à 15.000 euros d’amende pour incitation à la haine envers la communauté musulmane. Bien. Mais pourquoi, par exemple, les Indigènes de la République peuvent-ils continuer à qualifier les Français blancs de « Souchiens », de sous-chiens?
(1) Lire en particulier les commentaires du bloc-notes de la semaine dernière, qui traitent plus du mariage annulé que de la palme d’or cannoise…
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