L’extrême gauche européenne est aux anges. Le séisme du capitalisme est son cadeau. En Grèce, l’insurrection des étudiants, épaulés par des encagoulés, est le premier symptôme de l’instrumentalisation d’une crise aux conséquences imprévisibles. À Athènes comme à Salonique, une jeunesse idéologiquement embrigadée et économiquement délaissée se révolte au prétexte de la mort d’Alexis Grigoropoulos, 15 ans, tué samedi par un policier. En France, les ultras y voient la répétition générale du Grand Soir.
L’autodestruction du PS offre, il est vrai, le champ libre à Olivier Besancenot et à ses alliés. Quand le royalien (laissons les royalistes entre eux) Vincent Peillon dénonce, dans le texte d’orientation de Martine Aubry à peine élue, « une régression intellectuelle comme on n’en a pas vu depuis des années dans le parti », il repousse la perspective d’une gauche unie et raisonnable. Entendre Benoît Hamon, nouveau porte-parole, vouloir rétablir des autorisations administratives pour certains licenciements, confirme une disposition à la radicalité et à la flatterie des foules.
Les principaux ingrédients des guérillas urbaines grecques se retrouvent en France : forte implantation des extrêmes dans les milieux universitaires, embrigadement éducatif, paupérisation des surdiplômés, chômage. La légitimation de la violence, illustrée par le soutien de Besancenot à Jean-Marc Rouillan, ex-tueur d’Action directe, ou par l’empathie médiatique pour ce groupe de jeunes diplômés soupçonnés d’opérations terroristes contre la SNCF, rend envisageables de semblables actions, déjà vues dans les cités.
En regard de cette mainmise sur la jeunesse, la droite apparaît d’ailleurs dans son historique évanescence. Alors que l’opposition fait procès au gouvernement de vouloir contrôler l’audiovisuel public parce que le prochain président de France Télévisions sera nommé par le chef de l’État, elle a bel et bien gardé la haute main, à travers l’école et les médias, sur le modelage des esprits dociles. Ces jours-ci, les proviseurs s’inquiètent de la dureté des mouvements lycéens.
Pour avoir contribué, par une politique d’ouverture à gauche, à éreinter le PS qui aurait pu structurer et endiguer le mécontentement social, le pouvoir a affaibli un peu plus la droite tout en consolidant l’extrémisme antilibéral et antidémocratique. L’Éducation nationale est prématurément en effervescence. L’épreuve qui se profile pour 2009 révélera les capacités du pouvoir à résister à une extrême gauche sectaire et agressive. Celle-ci semble prête à toutt.
Besoin d’oxygène Ce qui ajoute à l’inquiétude : personne ne peut dire où la crise va mener ni si elle a montré tous ses effets. Que son envergure fasse l’objet de controverses entre experts montre l’incertitude qui entache les réponses aux successives ondes de choc. En choisissant de laisser filer les déficits (ils passeront de 52,7 milliards d’euros en 2007 à 60,7 milliards en 2008) et de repousser de deux ans (2014) le retour à l’équilibre budgétaire, le gouvernement fait le pari d’une épreuve rapidement maîtrisable. Mais ce qui ressemble à une fuite en avant ne risque-t-elle pas d’étouffer une machine épuisée ? Une politique de l’offre se reconnaît difficilement dans ces lointains grands travaux qui constituent un des socles du plan de relance présenté l’autre jour, avec la prime à la casse et l’enveloppe de 200 euros pour les bénéficiaires du RSA. Une réduction des charges des petites entreprises et des impôts des ménages n’aurait-elle pas apporté l’oxygène qui se raréfie ?
Société fragilisée Une chose est acquise : la crise économique et sociale va fragiliser encore plus la société, qui doit déjà supporter les mutations identitaires que connaissent les démocraties ouvertes. Nicolas Sarkozy le sait, quand il explique : « Les Français adorent quand je suis avec Carla dans le carrosse, mais en même temps ils ont guillotiné le roi. » Aussi serait-il inopportun que le pouvoir en rajoute dans les bouleversements. De ce point de vue, la détermination du président à autoriser le travail le dimanche pourrait se heurter à une irritation populaire. Il lui reste aussi à préserver l’unité nationale qu’un prosélytisme islamique a pris pour cible en se réclamant de la « diversité ». Mardi soir, sur Arte, une émission de Daniel Leconte, remarquable par sa liberté de ton (voir mon blog), a enfin abordé ce sujet interdit.
Cette vigilance est d’autant plus nécessaire que les droits de l’homme, dont la France célèbre le 60e anniversaire de leur Déclaration, sont contestés par des États musulmans. Ceux-là leur opposent une Charte islamique des droits de l’homme, conforme à la charia. Ce document, qui s’accommode des tyrans et de l’antisémitisme, servira de référence lors de la conférence de Durban II sur le racisme. En défendant, lundi, la conception « universelle » des droits de l’homme et en annonçant qu’il refusera de serrer la main de l’Iranien Ahmadinejad « qui a osé dire qu’Israël devait être rayé de la carte », le chef de l’État a fait preuve d’une fermeté qui n’a pas à épargner les islamistes de France.
Le Sénat inconséquent Le Sénat veut supprimer la demi-part supplémentaire accordée aux parents isolés n’ayant plus d’enfants à charge. Pour accabler un peu plus les vulnérables?
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