Les Caraïbes ont réussi à dégoûter de la révolution. Le soutien aux insurgés apporté par Olivier Besancenot (Nouveau Parti anticapitaliste), qui débarque aujourd’hui en Guadeloupe, donne une filiation politique à l’épreuve de force enclenchée. L’extrême gauche veut voir dans ces guérillas la répétition d’un grand mouvement social. Mais son appel à « suivre l’exemple de ce qui se passe aux Antilles » (Lutte ouvrière) est un repoussoir. La faillite de la Guadeloupe, dont l’assistanat débouche sur une violence rancunière, démontre ce qu’il ne faut plus faire.
En réalité, la dérive xénophobe qui s’y observe aurait dû suffire à disqualifier la grève générale, lancée peu après la victoire de Barack Obama. « La Guadeloupe c’est à nous ! La Guadeloupe c’est pas à eux ! » chantent, en créole, ceux qui réclament également « La Guadeloupe aux Guadeloupéens » et désignent les Blancs comme les profiteurs. Constater le silence des antiracistes et des droits-de-l’hommistes, qui enjoignent la métropole à s’ouvrir à la diversité, n’est pas la moindre des contradictions de ce conflit.
Ce département d’outre-mer est la caricature du mal français. Son économie administrée, aggravée par l’héritage aliénant de l’esclavage, l’a rendu improductif. Avec plus de 40 % de fonctionnaires, près de 25 % de chômeurs et un taux de RMistes quatre fois plus important qu’ailleurs, la déresponsabilisation a engendré la vacuité. Les habitants se plaignent à bon droit de « la vie chère ». Mais ce n’est pas en demandant toujours plus à l’État-providence que la Guadeloupe se déliera de la « tutelle coloniale » dont elle s’estime prisonnière.
Pareillement, les insulaires ont raison de s’inquiéter de la préservation de leur histoire, de leur mode de vie. La crise existentielle qui est portée par la population des Antilles, mais aussi de la Réunion, fait écho à un malaise similaire qui, en métropole, contribue à la dépression française. Cependant, le choix des meneurs extrémistes d’attiser la fracture identitaire entre communautés raciales et culturelles ne peut conduire, à terme, qu’à la guerre civile (que le leader du LKP, Élie Domota, envisage ouvertement) ou à l’indépendance.
Les Antilles posent de bonnes questions, sociales et sociétales, qui rejoignent les préoccupations nationales. Mais ceux qui se sont désignés porte-parole des mécontentements apportent des réponses qui conduisent à exacerber les maux dont se plaignent les gens. Un syndicaliste a déjà été tué, mardi, par les balles de jeunes ensauvagés. Si l’extrême gauche et sa gauche-caniche entendent répondre à la crise en prenant l’exemple de la Guadeloupe, nous voilà mis en garde…
Victoire des « régressistes » Aux Antilles comme en métropole, c’est tout un système économique, social, fiscal qui devrait être modernisé, afin de sortir d’un interventionnisme d’État qui infantilise la population et creuse les déficits publics. Or, c’est une politique inverse que semble vouloir suivre Nicolas Sarkozy qui, pour acheter la paix sociale, multiplie ces jours-ci les chèques en bois, en dépit des alertes de Bruxelles. Le pouvoir s’est laissé prendre dans les rets des revendications syndicales, en cautionnant leur vision d’un désarroi réduit au seul pouvoir d’achat. Quand François Chérèque (CFDT) dit vouloir « profiter » du « début d’affolement » de l’exécutif, il décrit un manque de sang-froid du pouvoir (Henri Guaino, conseiller du président, parlait lundi de situation sociale « dangereuse »), qui paye son excessive dramatisation initiale de la crise.
Pour s’être mis en rempart, Nicolas Sarkozy subit les assauts conjugués de tous ses opposants et singulièrement d’une gauche hystérique, qui n’a comme programme que de revenir à l’interventionnisme étatique et d’annuler les réformes entreprises, notamment pour l’Université. Mais cet effet de masse, qui envahit bruyamment l’espace médiatique, ne reflète qu’une partie de l’opinion. Faut-il rappeler que les « régressistes », qui ont réussi à imposer cette semaine le retour à un modèle social dispendieux, ne reflètent pas le choix des électeurs de 2007 ? Rien ne serait pire qu’un État affichant, sous couvert de pragmatisme, faiblesse et indécision. Sarkozy sera-t-il l’homme d’État attendu ? (voir mon blog).
Bonne nouvelle… L’attrait entêté de la gauche pour des choix ayant révélé leur calamité lui fait défendre des mécanismes ayant conduit à la faillite de l’École, dont Jean-Paul Riocreux, ancien inspecteur d’académie, dit qu’elle « tue lentement et avec méthode, sans haine mais sans relâche, ceux qui la fréquentent » (L’École en désarroi, PUF). Ainsi, hier,enseignants et étudiants défilaient-ils pour protester notamment contre le projet de supprimer les IUFM (Instituts universitaires de formation des maîtres), qui sont pourtant au cœur du désastre éducatif, tant ils ont contribué au conformisme des esprits et à leur déculturation. Certes, lundi, des manifestants ont fait une lecture en plein air de La Princesse de Clèves, qui se voulait une réponse aux réserves du président sur la nécessité de connaître cette œuvre pour une guichetière. Or cette réflexion, bien inutile il est vrai, reprenait celle du Conseil représentatif des associations noires (voir Le bloc-notes, du 5 décembre 2008), qui avait été approuvée alors par le bien-pensisme. Par anti-sarkozisme, le syndicalisme enseignant serait-il prêt à se réconcilier avec le savoir et l’élitisme? Ce serait la bonne nouvelle de la semaine…
Je participerai, ce vendredi, à deux débats sur BFMTV (12h45 et 13h10)
S’abonner
0 Commentaires
le plus récent